BALADE À LA RECHERCHE DES VIEUX COMMERCES DE PUJAUT

LES VIEUX COMMERCES DE PUJAUT

En flânant dans les rues de Pujaut, il n’est pas rare de retrouver une ancienne devanture ou une vieille enseigne qui témoignent du passé commerçant de certaines bâtisses. Petit retour en arrière, à une époque où les rues du village étaient plus animées !

 

 

Grâce à la mémoire des anciens, magnifique machine à remonter le temps, redécouvrons Pujaut au fils des époques :

Commençons la balade par le cœur du village.

L’emblématique place du 11 novembre avec le “Café du midi” qui outre sa fonction de bar, animait fortement la place : bals, cinéma, pétanque… il fut un temps dénommé « le bar des fans de Johnny ».

Café de France
Légende

La place a connu dans des temps plus anciens deux autres bars : un au fond du Planet et le “Café de France” à la place actuelle d’Andiamo pizza. Au même endroit, existait l’épicerie « le Soleil » tenue par Madeleine BOUZON, la pharmacie FAVIER LIMASSET puis le bazar-droguerie de Mme SAVY ; en face au 34 la boucherie de Louis BOURGUES dit « Louis le Boucher » ; au numéro 10 l’épicerie d’Espérite RICARD ; au 5 le ferblantier (restauration d’ustensiles ménagers ou de la vie courante en fer blanc) PEYRONNEL et au-dessus l’infirmière Mme BLANC ; au 11 une autre infirmière Mme AGNES.

Place des Consuls au numéro 4, se trouvait la cantine pour les enfants des granges, tenue par Mme GILLES et sa fille Denise. La plupart des écoliers qui habitaient les fermes isolées du côté des Gravières, de St Anthelme ou de Beauchamps ne rentraient pas chez eux à midi et se restauraient dans cette cantine familiale.

Au 8 l’épicerie « Le Casino » de M. et Mme MONIER puis des époux FAYON ; au 10 le magasin de tabac, chaussures, bonbons de la famille IMBERT avec son atelier de bourrellerie juste au-dessous rue Verdun.  Le bourrelier était l’artisan qui fabriquait, entretenait et réparait les équipements du cheval ou de tout autre animal de trait. 

On y trouvait également la mercerie de Mme COLIN et celle de Mmes LAILY et GAMBU au n°11, où auparavant se trouvait le magasin de chaussures de Mme NOYER ; au 12 la laitière Theresa RICARD ; au 13 l’agence immobilière BONFILS. A l’angle de la rue Pente rapide, se trouvait également un bar.

 

Continuons rue de la Mairie au n°6 le coiffeur Auguste LEYDIER ; au 11 la boulangerie CHIRON, « Mado » servait avec sa balance de Roberval et le « Mitron » faisait un pain très parfumé dans son four au feu de bois ainsi que des brassados succulents. Au 13, se trouvait l’épicerie charcuterie DORTINDEGUEY tenue par « Léa », pendant qu’Auguste était dans son atelier de charcuterie ; en face dans une maison aujourd’hui rasée un marchand de bonbons et friandises M. AUBRESPIN ouvrait uniquement le dimanche à la sortie de la messe ; au 18 l’électricien Paul RICARD réparait aussi les appareils ménagers.

 

Au-dessus de la porte d’entrée de l’épicerie charcuterie se trouvait une enseigne en tôle peinte en rouge avec un cochon rose qui pleurait à chaudes larmes et sur laquelle on pouvait lire : “Ne pleure pas grosse bête puisque tu vas chez A. DORTINDEGUET”. L’artiste qui avait conçu cette enseigne était Auguste COUSIN, très habile de ses mains et sachant tout faire. Il était l’un des deux cantonniers du village avec Maurice HERAUD qui avec son tambour (exposé dans l’entrée de la Mairie) annonçait d’une voix haute et déterminée les informations municipales aux divers carrefours de notre petit village.

 

N’oublions pas au 42 de la rue Haute le cordonnier BOUISSONNAS et au fond de la rue Boud’huile l’horloger GAILLARDON au n°79.

Repartons de la rue de la Grande Maison où se trouve au n°8 le magnifique moulin à huile ROUCHETTE dont l’activité cessa au début du 20ème siècle et descendons la rue Sous le Vallat : on y trouvait au n°4 la boulangerie pâtisserie VELAY qui faisait aussi d’excellents brassados. MULLER, Jean-Luc VELAY, QUENEL puis CARRE lui ont succédé.

Egarons nous à l’angle de la rue du château avec le maréchal ferrant Simon CELLET dit « Papelard » au n°23.

Au 22, il y avait l’épicerie de Jean et Lucie IMBERT où l’on trouvait de tout et en face l’atelier du bourrelier. Au n°9 place du château, l’épicerie tabac HERBOMEL puis BLANC se sont succédé ; le lavoir du château était animé par les lavandières et les mamans des familles nombreuses.

Revenons rue Sous le Vallat ; au n°6 la coiffeuse Mme BOUCHE ; au 11 l’épicerie de Marie-Jeanne RODE ; au 12 les courtiers expéditeurs Henri et Louis RODE qui achetaient au marché de Pujaut et revendaient aux grossistes notamment au marché de gros de Châteaurenard ; au 25 le coiffeur Jean BOUNNIEUX. Au 27 et 29 travaillait l’ébéniste Valentin POIROTTE qui était aussi poète, il a écrit le très beau poème sur Pujaut « A mon pays natal » (voir encart) et a créé de belles cartes postales du village au début du 20ème siècle.

Epicerie de Mme Rode

Au 33 le cordonnier BOUVET dit « Bléblet » ; au 37 un courtier en fruits et légumes M. CAULET ; au 47 l’épicerie, boucherie charcuterie CLAVEL où s’installa ensuite « le Casino » de Jeannette et Joseph FAYON qui faisait aussi la presse et vendait du bon lait frais au détail, le magasin fut repris par Victoire et Michel GARCIA.

 

 

 

Le Casino des Garcia
Le Casino des Garcia
Le couple Garcia
Le couple Garcia

Nous arrivons maintenant au lavoir des quatre tuyaux où travaillait l’une des dernières lavandières Rose BOURGUES qui habitait au 59. Les demoiselles MANCY, autres lavandières blanchisseuses, habitaient au 1 rue du Stade ; citons aussi Paulette BLACHE mère de 8 enfants, on la voyait fréquemment y laver les maillots des joueurs de l’USP ! En face du lavoir se trouvait un restaurant justement nommé LES LAVANDIERES, remplacé depuis par le traiteur le GARDE MANGER.

 

Fous rires dans l’épicerie lorsque, s’exprimant dans la “sono” installée à l’occasion de la fête votive, le préposé du comité des fêtes oublia dans sa précipitation de prononcer la cédille à maçonnerie générale en énumérant tout en lisant sur sa liste, le nom des commerçants et artisans ayant participé à son financement.

De même, lorsqu’une célébrité locale surnommée “Charlemagne”, un peu portée sur la boisson, vint en titubant acheter une bouteille d’apéritif ; il la tomba en sortant du commerce et rentra de nouveau, le goulot à la main, en se plaignant que la bouteille était défectueuse et qu’il fallait lui en fournir une autre gratuitement !

Autre anecdote, lorsque deux autres personnalités locales se chamaillèrent dans le magasin ; l’un des deux belligérants voulant prendre l’épicier à témoin, celui-ci lui répondit qu’ayant un commerce il ne voulait pas se mêler de leurs histoires. Vexé, le coléreux ne remit plus les pieds dans le magasin mais il prit bien soin de faire faire ses courses par un familier !

 

Continuons route de Four ; au 8 vivait le cordonnier Adrien ESTOURNEL et au 23 se trouvait la première supérette de Pujaut TIMY gérée par M. ABBAL ; ce fut ensuite la superette SCORE.

Repartons un peu plus bas dans le village.

Route de Tavel, se trouvait la menuiserie CASSAGRANDE. Au 15 rue de l’Aviation le centre équestre d’André DAVID, passionné de chevaux, son manège a permis aux jeunes de l’époque de s’initier à l’équitation.

Au 13 de la rue des Lions on trouvait l’atelier de l’ébéniste René ABATE , au 15 un marchand de produits agricoles M. BERTRAND, au 39 un autre marchand de produits agricoles M. POIROTTE à qui succéda Jean JOUFFRET ; ce dernier installa en face près du bar du Marché une pompe à essence (il fallait vraiment pomper) ; la pompe fut ensuite reprise par Balbine TROUILLET qui tenait le bar et dont le mari était mécanicien rue Saint Marc où il installa 2 pompes à essence ; le garage fut repris successivement par Messieurs SERRA, CHAMBON, Nicole et Michel CLAUDE, Sesto FRANCO et maintenant LG.

Nous sommes maintenant place du Marché où se trouvait au n°2 la « buvette du Marché » de Simeon DAVID. On pouvait aussi s’y restaurer, sa femme Marie était une excellente cuisinière. En dessous de lui en lieu et place de la salle polyvalente la scierie et fabrique d’emballages de son fils Léon DAVID dit « petit Léon ». Son entreprise employait beaucoup de jeunes du village. C’était un homme bon, il nous a quitté récemment à 96 ans.

Buvette David

Au fond de la place au n°5 le fleuriste « La Grange d’Andior » de Joseph FAUCON auquel succéda une crèche halte-garderie familiale « la Chaumière de Blanche Neige ».

Remontons la rue Fontvieille avec la boucherie charcuterie de Jacques et Simone COCHEME au n°11. Jacques allait aussi avec son « tube » Citroën vendre à Tavel. C’était un fervent et très loquace supporter de l’USP. Au 6 le courtier Gaston VIAL auquel succéda Damian JORDAN qui s’installa 3 rue du Stade ; au 13 l’épicerie « le Soleil » tenue par Véronique JOUFFRET ; au 8 la mercerie de Simone VIAL notre centenaire disparue en 2020. Au 15, la boulangerie coopérative avec son four à bois installée en 1931 et qui est toujours en activité. Elle se trouvait initialement au bout de la place du 11 novembre.

Boulangerie Union agricole de M. Vialat

Allons faire un tour rue Montconis : au n°3 le garagiste Emile BOURGUES dit « Mimile » et au 15 le meunier Aimé CAMBE.

Revenons place de la Poste avec le maréchal ferrant Jean BARTHELOT au n°15 ; au 11, c’est Maurice ALAZARD le marchand de légumes, charcuterie, fleurs. Son magasin fut remplacé par l’école de cuisine de M. FERELEC ; c’est maintenant l’emplacement de la marchande de fruits et légumes Francine LOPEZ   qui a longtemps fait son commerce au “Garage” de la rue Frédéric Mistral. Au 14 à la place du salon de coiffure Le pt’it Salon, se trouvait la mercerie de Mmes LAILY et GAMBU puis celle de Mme PIQUET.  Au 12, il y avait la pharmacie, au 10 une agence du Crédit Agricole à la place de la dentiste et au 8 le coiffeur Michel COULANGE.

Le maréchal ferrand

Continuons rue Alphonse Daudet avec au 19 le dépôt du syndicat agricole Vauclusien (engrais et produits agricoles) tenu par René MANIFACIER dit « Bras d’acier ». Ce surnom lui avait été attribué par les chauffeurs livreurs de cette coopérative car il rechignait à leur donner un coup de main pour décharger les sacs d’engrais!

Au n°2, se trouvait la garderie du « Patronage » ouverte les jeudis après-midi et durant les vacances scolaires. Les “gardiennes” étaient entre autres Mme AGNES et Mme MILON toutes deux religieuses, Louise COULON, Marcelle BOUZON et Bernadette GALLO.

En face, à la place du magasin Utile (le bien nommé !), on trouvait l’expéditeur “La Provence”, propriété de M. QUENTIN et Mme DIDIER dite « La Lyonnaise » ; la superette TIGRE a succédé à “la Provence ». Hormis la presse et la boulangerie pâtisserie qui n’ont pas bougé, se sont succédés une agence Groupama, un magasin de chaussures, un autre d’habillement, un marchand de fruits et légumes, une restauratrice de meubles…

N’oublions pas le pressing de Christine AUGUSTIN 14 rue Frédéric Mistral où se trouve actuellement la sage-femme Martine MERINDOL ; le magasin d’appareils ménagers et dépôt de gaz de Marie et René BOURGUES qui était plombier chauffagiste à l’emplacement de la pharmacie route d’Avignon suivie au n°5 de l’atelier de menuiserie ébénisterie de Francis ASTAY repris par Bruno BALOCCHI ; au 8 le ferronnier NIVOLLIERS à qui succéda Gilles BARRAS.

 

Rien ne manquait à Pujaut. A proximité des commerces et des métiers, les enfants jouaient mais étaient aussi curieux du travail des artisans qui patiemment leurs montraient ce qu’ils faisaient sans pour autant interrompre leur tâche. Les vieux venaient là pour papoter et rester dans l’ambiance tout comme sur le marché aux raisins de table sur la place du marché de juillet à novembre.

Toutes les rues étaient animées ; le son du marteau qui battait le fer ou clouait les fers des derniers chevaux chez les maréchaux-ferrants, le vrombissement des moteurs chez les mécaniciens, le bruit des machines et le crissement des scies chez “petit Léon” ou dans les menuiseries.

Les artisans entreposaient leur matériel chez eux dans le village. De nombreuses maisons étaient en fait des fermes aux portails souvent ouverts où se côtoyaient chevaux et tracteurs avec le cochonnier, le clapier, le poulailler, l’écurie, le grenier à foin dit “finière” et la remise pour le matériel.

Tous les matins, la vie redémarrait au rythme des saisons, plus ou moins tôt selon qu’on soit artisan, commerçant, ouvrier ou paysan.

Chaque maison a son histoire.

Le petit “bled” pas si paumé que ça, vivait... et vit toujours.

 

Merci à Denis Cochet pour son énorme travail de recherche et pour cet article qui nous fait revivre l’ambiance de la deuxième moitié du XXème siècle à Pujaut.

 

A mon pays natal 

Je t’ai toujours aimé, mon cher petit village,
 Mais ta place en mon cœur n’a cessé de grandir
La vue de ton clocher ranime mon courage,
Ce n’est que loin de toi que je me sens vieillir.

Abhorrant des cités, le fracas, les intrigues,
J’éprouve un vrai plaisir à venir parcourir
Les sentiers caillouteux sillonnant tes garrigues,
Bordés de thym, d’aspic et de doux souvenirs.

Je gravis lentement le flanc de ta colline,
Puis, arrivé là-haut, sur ce sommet béni,
Je salue humblement la vierge qui domine
Ton splendide terroir et tes vieux toits brunis.

Et là, pendant longtemps, assis sur une pierre,
Je respire l’air pur, le bon air de chez nous ;
Mais souvent mon regard va vers ton cimetière,
Ou des êtres aimés m’ont donné rendez-vous.

Enfin, quand du soleil luit le dernier reflet,
Lorsque ta vieille cloche égrène l’Angelus,
Je regagne mon toit, ému mais satisfait,
Heureux d’avoir vécu chez toi un jour de plus.

Pujaut septembre 1950
Valentin Poirotte

 

 

 

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